Contrat de crédit à la consommation : nullité, déchéance des intérêts, forclusion

Le contrat de crédit à la consommation est régi par des règles strictes qui découlent tant du droit commun du droit des contrats que de la protection particulière du droit de la consommation.
Le non respect de ces règles peut entraîner la nullité du contrat de crédit, la déchéance des intérêts ou la prescription.
Le cabinet Thelys avocats s’engage pour la défense des consommateurs avec le site thelys-justice.net.
I. Nullité du contrat de crédit à la consommation :
- A. Les règles du droit commun :
1.Vices du consentement :
Le consentement doit être sain, donné en connaissance de cause, et exempt de vices.
– Un contrat de crédit peut être annulé pour défaut de consentement de l’emprunteur :
- o Maladie mentale incompatible avec l’expression d’un consentement éclairé (CA Pau, 26 mars 2007)
– Un contrat de crédit conclus sous l’emprise de la violence, physique ou morale, peut être annulé :
- o Mise en scène de sorcellerie entrainant un climat d’épouvante (TI Aulnay-sous-Bois, 15 octobre 1987)
– Un contrat de crédit peut aussi être annulé pour erreur :
- o Un prêt est consenti en laissant croire qu’il s’agit d’un crédit à la consommation alors qu’il s’agit d’un contrat immobilier.
2.Cause :
La cause du contrat doit exister, elle doit être licite et morale.
Un contrat de crédit à la consommation destiné à financer une opération contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs pourra être annulé.
3.Capacité civile :
Le mineur ne peut contracter un crédit à la consommation.
Le majeur incapable :
– Sous tutelle : la nullité est de droit à partir du moment où la mesure est prononcée.
– Sous curatelle : appréciation in concreto du juge du fond. La cour de Cassation estime que la possibilité de s’endetter au-delà de ses revenus nécessite l’assistance du curateur (CASS. 1ère civ., 21 novembre 1984). Cependant, cette autorisation peut être donné a posteriori et de manière implicite…
- B. Les règles spécifiques :
1.L’offre préalable de crédit :
Le non respect des règles relatives à l’offre préalable de crédit est sanctionnée pénalement et civilement.
Les dispositions des articles L. 311-11 et suivants du code de la consommation sont d’ordre public. La sanction traditionnelle est donc la nullité. Elle est particulièrement inopportune, puisque l’emprunteur doit restituer les sommes déjà prêtés. La déchéance des intérêts lui est donc préférée, les juges du fond ne pouvant soulever d’office la nullité sur ce fondement (Civ. 1ère, 15 février 2000).
2.Droit de repentir art. L. 311-12 Code de la consommation:
Le consommateur-emprunteur dispose d’un délai de 14 jours calendaire à compter du lendemain du jour de l’acceptation de l’offre de crédit pour exercer son droit de rétractation.
Si l’emprunteur souhaite une livraison immédiate, ce délai peut être réduit à 3 jours (art. L. 311-34 Code de la consommation) mais devra faire l’objet d’une mention manuscrite sur le contrat de crédit.
En l’absence de mention manuscrite, le consommateur n’est pas censé avoir renoncé au délai de 7 jours.
Le non-respect du délai de repentir, ou l’absence de mention manuscrite relative au raccourcissement du délai, seront sanctionnés par la nullité (Cass. 1ère civ., 19 mai 1992).
II. Déchéance des intérêts du contrat de crédit de la consommation :
- A. Période précontractuelle :
1.Fiche d’information art. L 311-6 Code de la consommation:
« Préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le préteur ou l’intermédiaire de crédit donne à l’emprunteur, par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l’emprunteur, compte tenu de ses préférences, d’appréhender clairement l’étendue de son engagement ».
Le contenu de la fiche d’information est déterminé dans l’article R311-3 du Code de la consommation.
L’absence totale ou partielle des informations précontractuelles qui doivent être fournies au consommateur est sanctionnée par la déchéance des intérêts (devoir d’information).
2.Evaluation de la solvabilité de l’emprunteur art. L.311-9 Code de la consommation :
Impose au préteur de fournir au consommateur les informations suffisantes pour que le candidat-emprunteur puisse apprécier l’adéquation entre les échéances de remboursement du prêt et sa solvabilité (devoir d’explication).
La carence du préteur dans la vérification de la solvabilité du débiteur (consultation du Fichier national des incidents de remboursement, devoir d’explication des informations fournies, de mise en garde) est sanctionnée par la déchéance de tout ou partie des intérêts dans la proportion prévue par le juge
- B. Période de formation du contrat :
1.Offre préalable de crédit art. L. 311-11 du code de la consommation:
Les opérations de crédit à la consommation sont conclues dans les termes d’une offre préalable.
Le préteur ou intermédiaire de crédit doit faire figurer sur son offre préalable de crédits certaines mentions obligatoires (art. R 311-5 et art. L.311-10 et s. Code de la consommation).
Les dispositions des articles L. 311-11 et suivants du code de la consommation sont d’ordre public.
Pourtant, la déchéance du droit aux intérêts est préférée à l’annulation.
2.Formulaire détachable art. L 311-12 Code de la consommation:
L’offre de crédit comporte un formulaire détachable, conforme au modèle annexé à l’art. R311-4 du Code de la consommation, permettant l’exercice par le consommateur de son droit de rétractation.
L’omission de ce formulaire est sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts.
III. Dommages et intérêts :
Il appartient au prêteur ou à l’organisme de crédit de rapporter la preuve de l’exercice de son obligation d’information (devoir de mise en garde, d’explication, consultation du Fichier national des incidents de remboursement).
Cette obligation d’information s’exerce pendant la formation du contrat de crédit mais peut aussi s’exercer pendant l’exécution.
L’emprunteur peut demander des dommages et intérêts en cas de faute du prêteur ou de l’organisme de crédit.
IV. Délais art. L. 311-52 Code la consommation:
- A. Durée :
Tous les litiges concernant les opérations de crédit énumérées à l’article L. 311-1 du Code de la consommation sont soumise au délai de forclusion de 2 ans.
La réforme intervenue par la loi du 11 décembre 2001 limite l’application du délai de forclusion aux actions en paiement consécutives à une défaillance de l’emprunteur.
Il faut donc en conclure que toutes les actions intentées par le consommateur-emprunteur ou la caution ne relève pas de ce délai.
En effet, l’action du consommateur se trouve soumise au délai de prescription de droit commun (5 ans).
- B. Point de départ :
Le point de départ du délai se situe à la date d’exigibilité de l’obligation qui lui a donné naissance (Cass. 1ère civ., 9 décembre 1986).
Si l’emprunteur ne répond pas à la demande de paiement de la part du créancier, ce jour, qui marque le premier incident de paiement non régularisé, constitue le point de départ du délai de 2 ans.
Le point de départ du délai est donc variable en fonction de la nature du conflit. Quatre cas sont précisés par l’article L. 311-52 du Code de la consommation.
– Résiliation ou terme du contrat : Si le créancier laisse passer le terme du contrat et que l’emprunteur ne paie pas, le terme marque le point de départ du délai de 2 ans.
– Défaillance de l’emprunteur : La point de départ est la date du premier incident non régularisé ayant entrainé la déchéance du terme. Il appartient au prêteur de justifier non de la dernière échéance payée mais de la date du premier incident de paiement (Cass. 1ère civ., 22 mai 1996)
– Procédure de surendettement : Le délai de deux ans ne court qu’à compter du premier incident de paiement non régularisé intervenu après l’adoption du plan ou après la décision du juge de l’exécution (Cass. 1ère civ., 13 février 2007).
– Découvert bancaire : Le point de départ du délai de forclusion est le dépassement du montant autorisé du découvert après le délai de trois mois au bout duquel celui-ci doit être transformé en crédit à la consommation.
– Irrégularité de l’offre préalable de crédit : Hypothèse non prévue par le code. Le point de départ est la date à laquelle le contrat de crédit est définitivement formé (Cass, 1ère civ., 7 novembre 2006).
consulter aussi les articles : Délai de forclusion et crédit à la consommation
et voir:
Prescription biennale sur les crédits immobiliers : Jurisprudence du 11 février 2016